Dernier
mois de cette année 2012, décembre… Je ne sais pas vous, mais pour moi, il y a
des jours où je ne sais trop pourquoi, je sens que tout ira bien. Ces deux
jours en furent et bien au-delà de ce que j’imaginais.
Hier matin déjà, je
me sentais tellement bien, que mon thé a été vite choisi, ce sera le Tumsong, un Darjeeling issu du Jardin
des cœurs heureux de ThéÔdor. Tout en savourant ce
breuvage si subtil, je me plonge dans cette Bible et plus particulièrement dans
le chapitre Recettes, je veux tester certains plats que j’aimerais proposer
bientôt à mes invités.
Ce midi, je passe de l’Inde au Japon avec un
savoureux Sencha griffé Tamayura.
Je repense alors à ces fabuleux passés avec Olivier le 18 novembre passé. (http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2012/11/que-dire.html
).
Une deuxième infusion et un peu de Haïkus.
J’ai choisi celui-ci
parce que ce matin, quelques canards ont survolé la maison… Mais j’arrête assez
vite, je pense à la rencontre de cet après-midi… Il y a près de deux semaines
et pour faire court, Pierre m’envoie un courriel me demandant si j’accepterais
de rencontrer une jeune amie chinoise, doctorante en anthropologie culturelle
dont le sujet de thèse est toujours pour faire court, La Voie du Thé. Me poser
la question était y répondre ! Nous voilà donc partis pour
Louvain-la-Neuve, j’ai hâte de mettre un visage sur un nom d’autant que les
quelques courriels échangés avec Jing m’ont vraiment donné envie de la
connaître. L’accueil est chaleureux, la table est prête et nous sommes invités
à nous asseoir pour une "petite" dégustation.
Alors, là… je
suis restée sans voix et au début, j’ai eu du mal à me concentrer sur ce qui se
déroulait à table. Dans une cité universitaire, on s’attend plutôt à ce que les
murs soient recouverts de livres savants bien rangés dans des étagères
mais ici, pas de bibliothèque mais une … théothèque !
Premier thé
offert : un Pu Er, un Ye Sheng Zia
ou bourgeons pourpres.
Tout en le préparant, Jing nous raconte son
histoire, ce thé était déjà connu au 8e siècle et faisait partie des
tributs de l’Empereur.
En la voyant verser ce breuvage après avoir admiré
ses gestes précis et si harmonieux, une phrase me revient, celle de Jiao Ran, un
moine poète, ami de Lu Yu : "J’hésitais à prendre ces feuilles
semblables au jade pour les transmuter en liqueur surpassant l’or."
C’est ici que commencent les émotions gustatives, Annik, Pierre et moi sommes
transportés par les incroyable et subtils parfums qui se dégagent des tasses à
sentir. Quant à la liqueur précisément, c’est une explosion de saveurs qui se
dégagent tout au long des nombreuses infusions, tour à tour des notes fleuries,
d’amande, légèrement sucrées, tout en nuances, et en douceur.
Ces feuilles
n’ont pas encore tout donné, mais Jing veut nous emmener à la découverte d’autres
trésors.
Notre deuxième voyage gustatif nous emmène à Taiwan, cet Oolong
porte le nom de Mélodie céleste,
tout un programme…
Jing l’infuse dans un petit zhong en porcelaine.
Une première infusion, assez corsée, avec une légère amertume en arrière-goût.
Jing, toujours aussi concentrée, nous parle maintenant du Qi du thé, le thé est
par excellence le conducteur de l’énergie parce qu’il provient entièrement de la
nature. Autant la mélodie de départ était forte, un peu brutale, autant au fil
des infusions, elle s’est faite plus nuancée, plus subtile, plus en douceur
avec des parfums et des saveurs où les fleurs dominent.
Je vis avec
intensité ces moments hors du temps, et je ne suis pas la seule…
Celui-ci
non plus n’a pas tout donné. Les feuilles sont d’un beau vert brillant.
Admiration,
j’aime cette attitude de Pierre et Annik, comme un hommage à celles qui ont
enchanté nos palais et nos cœurs.
Depuis le début de cette séance, je suis
en admiration devant cette théière qui complèterait bien ma collection.
Déjà
quand j’étais allée à Taiwan, j’avais failli craquer, la prochaine fois, c’est
certain, je passerai à l’acte !
Nous restons à Taiwan, Jing s’apprête
à nous faire découvrir ce Bai Nian Yuan
Sheng Hong Cha, un thé rouge planté il y a une centaine d’années autour du
lac de la Lune et du Soleil.
Pendant qu’Annik et Pierre, qui parlent
chinois, décortiquent ce qui est noté sur l’étiquette, je m’évade quelques
instant, je suis sur ce lac.
Ce jour-là, il faisait assez brumeux, ce qui
lui donnait un charme et un mystère particulier. Mais il est temps pour moi d’atterrir
et de découvrir ce que, magnifiées par l’eau, ces feuilles nous donnent.
Et là, malgré la jolie couleur ambrée de l’infusion, c’est la déception, ce thé
nous donne tout en bloc, sans nuance, à prendre ou à laisser. Ce qui me vient
pour le qualifier, c’est qu’il me fait penser au travail d’un apprenti qui a
encore beaucoup à apprendre dans l’art du traitement des feuilles. Les
infusions suivantes me laisseront sur cette impression, question de goût
évidemment.
J’ai bien ri en entendant la réflexion de Jing pour qui ce thé
a une saveur de pommes de terre et de patate douce, "et moi j’aime les
patates"…
Nous restons dans les thés rouges mais partons au Yunnan avec
ce Ji Pin Dian Hong .
Un Yunnan,
cela devrait me transporter. Et effectivement, cette Qualité extrême (Ji Pin) me transporte. J’y retrouve toutes les notes que j’aime
dans ce thé, celles d’un terroir riche et généreux, mais ici tout est en
nuances, il se donne par petites touches au fil des infusions.
Pendant que
j’admire ces belles, j’écoute, pâle d’admiration (et avec une petite envie de…)
Annik, Jing et Pierre parler de ce Yunnan qu’ils ont visité.
Nous restons
dans le Yunnan avec ce Pu Er en vrac
de 22 ans, issu de théiers sauvages de 1400 ans d’âge. Ces grandes feuilles
torsadées nous promettent de bons moments quand l’eau les aura réveillées.
Toujours ces mêmes gestes lents, précis qui participent à l’atmosphère de
sérénité qui règne ici. Dès la première infusion se dégagent un parfum plus
fumé et une saveur assez prenante, il a encore la vivacité des jeunes crus, ce "vieux "…
Les belles nous offrent ici une partie de leur intimité, lovées qu’elles
sont dans cette magnifique théières taiwanaise. Les infusions se suivent,
explosions de saveurs et les émotions suivent. Nous sommes littéralement
subjugués et Jing va définir ce thé d’une manière magistrale : C’est
un enfant doué qui va grandir et devenir très talentueux.
Manifestement, elles n’ont pas encore tout donné.
Je ne savais pas alors que
je pourrai bientôt le vérifier…
Un coup d’œil admiratif sur celle qui a
abrité ces feuilles, on pourrait croire qu’elle est en pierre. Elle fait penser
à des écailles de tortues.
Nous sommes déjà au nirvana, et ce n’est
pourtant pas terminé. Un Tuo Cha maintenant.
Jing en a découpé un qu’elle a mis dans une superbe
jarre.
En humant ces feuilles, je crois déceler un parfum de terre
caractéristique.
Ce Pu Er cuit a une couleur sombre, transparente.
Et
toujours les mêmes gestes rituels par les sens, d’abord l’odorat avec la tasse
à sentir.
Et des différentes infusions se dégagent aussi une palette
aromatique riche, des odeurs de terre mouillée,
des saveurs de réglisse, mais pour toutes une grande douceur. La dominante est
son impressionnante douceur.
Les feuilles infusées, beaucoup plus petites,
ont encore des choses à nous livrer, mais le temps passe. Ce ne sera pourtant
pas le dernier trésor…
Last but not least, encore un Pu Er, en vrac de …
1970, le Liao Fu San Cha. Il nous offre ici aussi une jolie palette de parfums et de saveurs :
camphre, terre et feuilles après la pluie.
Je suis réellement transportée,
je n’ai plus aucune envie de rien, « seulement » rester dans état d’extase,
j’en oublie même d’immortaliser les feuilles et les liqueurs.
Voilà le
bouquet des sept trésors que Jing nous a si généreusement offert en dégustation
dans cette atmosphère si sereine. Mais sa générosité ne d’arrête pas là, nous
repartons avec certains… C’est le cœur un peu serré que nous quittons notre si
généreuse hôtesse en lui disant notre MERCI pour ces moments hors du temps dans
l’esprit du thé, le respect des feuilles et de ceux qui au bout du monde par un
travail minutieux et patient nous ont permis ces émotions gustatives ;
MERCI aussi à vous deux, Pierre et Annik, j’ai toujours plaisir à vous revoir
et vous entendre parler de vos voyages dans ce pays qui vous est chevillé au cœur !
Pierre cher Pierre d’avoir initier cette si belle rencontre. En rentrant, j’ai
immédiatement envoyé un petit mot à Jing que je n’avais encore jamais. C’est ce
qui m’émeut toujours profondément dans certains premiers contacts, c’est ce
courant si spécial qui passe instantanément sans phase d’apprivoisement,
celui-ci en fut. Il n’y a pourtant en principe que le coup de foudre qui
échappe à cela. Sa réponse a été immédiate : "Je suis vraiment heureuse de t’avoir rencontrée ; quand les
personnes de thé se rencontrent, cet amour du thé fait fondre toutes les
barrières. Vivre dans la voie du thé, est aussi mon grand souhait, nous la
partageons"» Ce premier jour du mois commence vraiment très fort. Et
ce n’est pas fini, je me suis réveillée ce matin dans ce même état de sérénité
profonde qui ne m’as pas quitté depuis hier.
Un coup d’œil dehors.
Pas le
temps d’ "admirer" le paysage, le téléphone sonne, ce sont mes
amis qui se décommandent pour ce midi, la neige est tombée en abondance dans
leur région et les routes sont dangereuses. Je suis partagée, d’un côté je me
faisais une joie de les revoir, mais en même temps, j’ai de quoi m’occuper… et pendant un bon moment
Retour dans mon salon bleu-thé pour infuser à nouveau ces magnifiques bourgeons
rouges.
Dont le parfum se dégage déjà, à peine plongées dans l’eau.
L’infusion,
dont la couleur est nettement plus foncée qu’hier, garde une saveur très douce
mais plus boisée. Au fur et à mesure des passages, je me remémore les moments
fabuleux d’hier.
Je ne les compte plus, mais celui-ci sera le dernier.
Ce beau camaïeu de bruns laisse apparaître certaines feuilles plus pourpres.
Sauf celle-ci, restée très verte.
Deuxième trésor, "l’enfant
doué", ce vieux Pu Er vert encore très … vert.
Infusé en
petite théière, je suis curieuse de voir s’il va me transporter comme hier.
C’est évidemment le cas, il a perdu ses notes fumée, il est doux et si
rond en bouche.
Les feuilles sont très grandes et leur palette de couleur
va du vert olive au brun quasi noir.
La liqueur est plus ambrée, les
saveurs deviennent moins subtiles.
Je ne me lasse pas d’ouvrir la théière
pour admirer les belles.
Le liquide est plus aqueux maintenant, je devrais
l’infuser plus longtemps.
Ici, je ne commente plus, je me contente d’admirer.
Avant de continuer, le soleil me pousse à faire un petit tour dehors, histoire
de faire le plein de lumière, cela ne durera pas.
Infusées plus longtemps,
les feuilles reprennent vie et saveur.
Le soir tombe vite, les feuilles
commencent maintenant à s’épuiser.
Elles sont libérées à présent.
Parmi elles, je repère cette grande verte de 8 cm.
Et ces trois-ci, très
foncées et encore torsadées.
Il est 4 heures, ce beau ciel me fait oublier ce
qu’il y a dessous. Je vais maintenant quitter mon cocon, je passerai le reste
de ce fabuleux week-end avec mon mari.
3 commentaires:
Mon dieu mon dieu mais que c'estmagnifique, quels superbe moments tu as du passer, quelle belle rencontre, je t'imagine en l'évitation,à quelques cm de ta chaise, les tasses fumantes et colorés dansant autours de toi!!!!
a tantôt
Bonjour Francine,
Quelle week end ! Bon je suis rassurée de lire que tout va bien :) tu n'avais pas répondu a mon mail donc je me faisait un peu de soucis.....
Bonne fête de St Nicolas ( depuis que nous habitons en Belgique et donc qu'Emilie est petite on fête la St Nicolas !!)Donc elle a le privilège d'avoir plusieurs fëtes, celle d'ici et les Japonaises ;)
Biz
@ Fabienne: superbes moments? C'est peu de le dire! Et tu connais la meilleure? On remet cela samedi... Bonne soirée, biz
@ Cathy: ça alors! dès que j'ai fini la réponse, je vais voir mes mails et j'y réponds immédiatement. Ceci dit, pendant 2 jours, j'étais coincée, j'ai glissé dimanche soir dans la neige en allant conduire les poubelle!
J'adore cette fête, saint Nicolas est mon grand ami... Emilie a de la chance, il y a de très jolies fêtes japonaises, symboliques. A très vite, bonne soirée, biz
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